Le crowdfunding connait depuis quelques années une ascension fulgurante qui en fait un mode de financement incontournable pour les start-up et les promoteurs. Avec quelque 233,8 millions d’euros collectés dans le monde en 2016 tous secteurs confondus, le financement participatif procède d’une mécanique simple propre à la tontine, tradition aussi ancienne que méconnue. Une communauté de pairs, d’investisseurs abreuve une cagnotte confiée à un tiers de confiance en vue d’un projet économique. Les sommes sont ensuite redistribuées aux contributeurs sous forme d’intérêts (crowdlending) ou de prise de participation dans le projet (equity). La pratique, démocratisée par les bien connus SmartAngels, Crowdfunder ou Kickstarter, s’est rapidement propagée à l’immobilier français avec l’irruption tonitruante de plateformes comme Anaxago, Wiseed ou encore Lymo. Celles-ci permettent de pallier avec agilité et transparence l’incapacité des banques à financer des projets innovants dont les cash-flows sont bien souvent irréguliers et incertains. De la tontine africaine au crowdfunding immobilier, les acteurs défilent mais les méthodes, elles, survivent à l’épreuve numérique.

 

Pour les plateformes, 2016 s’est révélée être une année particulièrement prolifique. Depuis l’inauguration du premier projet financé par Wiseed en 2011, le marché du financement participatif immobilier a pourtant connu de pénibles mois de gestation et une année noire en 2012, avant de raccrocher les wagons avec une expansion vertigineuse des volumes depuis 2014. Les chiffres interpellent : les collectes ont progressé de 84% entre 2015 et 2016, et, avec quelque 30,2 millions dans l’escarcelle, le 1er semestre 2016 arrive à lui tout seul ex-aequo avec l’exercice 2015. En tout et pour tout, 61% des 90,5 millions collectés entre 2011 et 2016 l’ont été en 2016. La montée en flèche des stocks d’épargne drainés par les plateformes reflète la part de plus en plus importante de l’immobilier dans l’equity crowdfunding (22% en 2016).

 

Autre signe que le marché s’est étoffé, on est passé de 11 plateformes en 2011 à 17 en 2016. Ce qui n’empêche pas les deux mastodontes Wiseed et Anaxago de se disputer la part du lion, pesant à eux deux pas moins de 64% des montants collectés en 2016. L’accroissement du nombre d’acteurs est toutefois à voir d’un bon oeil, en ceci qu’il permet de différencier l’offre proposée aux investisseurs. Le ticket d’entrée à 100 euros lancé à la rentrée 2016 par Lymo permet à cet égard d’ouvrir l’investissement à des profils d’épargnants plus jeunes, plus modestes et mécaniquement plus nombreux. L’engouement suscité par ces produits tient principalement à des taux de rentabilité interne (TRI) affriolants et à des cycles courts : Anaxago peut à titre d’exemple se targuer d’offrir un TRI de 10,4% en 2016 sur une période de 18 mois. En comparaison, placer son argent en Société Civile de Placement Immobilier (SCPI) rapporte environ 5% pour une durée d’immobilisation de 20 ans.

 

Les 131 projets financés en 2016 se sont répartis à près de 90% dans l’immobilier résidentiel, principalement en région francilienne, dans le Sud-Ouest et dans le bassin rhodanien. Signe que le modèle fait ses preuves, on a dénombré pas moins de 38 sorties et un taux de défaut nul de la part des plateformes.

De quoi faire sortir les risquophobes du placard? L’actualité récente, marquée par la mise en redressement judiciaire de la maison-mère de Terlat Industries, un promoteur engagé avec Wiseed et Anaxago peut inquiéter. Si l’éventualité d’un effet domino vient assombrir le tableau, Anaxago a immédiatement tenu à rassurer ses investisseurs dans un communiqué de presse paru en Janvier dernier.

 

Clément Jourdan

 

Chiffres : hellocrowdfunding.com & goodmorningcrowdfunding.com & immobilier.anaxago.com