Live office, flex office, home office, shared office, smart office, agile office, connected office, zen office, hot desk office… Deux boites de Vogalib sept-cinq, s’il vous plait. Notre génération – X, Y, Z ? Il y avait plus de lettres dans l’alphabet cambodgien – sera donc celle d’une refonte radicale des modes de travail. Patrons, retournez sur les plateaux, seniors, taisez-vous et écrivez sur des post-it, jeunes cadres, saisissez les rênes lacérées des multinationales et laissez vos expériences de stagiaires auditeurs nous souffler les stratégies de demain. Employés, ne tremblez plus, c’est le temps du home office, jardiniers, jouissez, c’est l’âge d’or des baobabs. Une étude menée sur quatre employés en Pologne et en France montre que 100% des consultés se sentent moins efficaces en travaillant de chez eux, 25% admettent consacrer le plus clair de leur temps en réunions extra-professionnelles, tandis que 75% rient à l’évocation même du concept.
Rappelons quelques règles fondamentales d’une économie saine.
L’essence d’une entreprise est le profit. Les chemins pour y parvenir sont infinis. Ils sont tous redoutables, denses, voraces et pernicieux – certains sont discutables ou illégaux. Le profit ne tombe pas d’un feutre fluo sur une tablette septième génération. Le profit se conquiert et se conquiert avec des femmes et des hommes. Ces personnes se forment par le travail, l’acharnement, dans le courage et avec une extrême résilience. Ces personnes sont portées par des leaders d’expérience, des personnes dont le cuir râpé s’est usé dans la douleur, que les erreurs graves et les chevauchées dangereuses ont porté vers la sagesse, une flamme légère que l’on devine, tapie, dans l’iris joueur de chaque grand dirigeant. La discipline et la volonté forgent les succès, façonnent le progrès et enfantent les capitaines.
Instiller une flexibilité des mœurs professionnels n’est pas une innovation, c’est une erreur. Cette erreur repose sur la naïveté perturbante qui est de croire éperdument aux capacités auto-disciplinaires, à l’égalité des ambitions et à l’alignement des motivations.
Créer des espaces de coworking, nettoyer et faire respirer les plateaux de bureaux, pousser les collaborateurs à l’échange, au dynamisme, à l’ouverture, pour moi c’est un grand OUI, c’est une évolution saine vers un bien-être fondamental. C’est placer mon collaborateur au centre de ma lorgnette, à la droite de mon Client, c’est tirer le meilleur d’entre eux en les appréhendant avec un amour et un respect sans limites. Mais provoquer le home-office, créer des espaces de siestes et de jeux vidéo, c’est offrir une nouille à branler, c’est célébrer l’oisiveté, c’est tuer son collaborateur et c’est assassiner sa société. Je n’ouvre pas Facebook quand je prépare une négociation de VEFA à 50 MEUR dans un marché qui accuse 17% de vacance.
Le respect et l’attention, la capacité à évoluer en ligne avec la modernité, à flirter avec la mode, à exciter ses clients avec des solutions nouvelles, les titiller avec de bandantes innovations sont les superbes signes de l’intelligence des affaires et de l’Homme. Le laxisme et la facilité sont les cancers de notre temps, et, mes rigolos, il est grand temps d’ouvrir l’enveloppe de l’IRM.
Développer des bureaux dont les outils accélèrent les processus, un grand OUI, pousser l’accouplement entre start-up et grosses institutions grâce a des plateaux dédiés, un grand OUI, apporter de la flexibilité et du dynamisme aux baux et aux espaces, un grand OUI, là on innove et on prend du plaisir, là on travaille au progrès de demain et à l’efficience future et redoutable des effectifs. Mais comment peut-on croire un instant, un instant, a l’efficacité d’une personne qui travaille depuis chez elle. Je veux bien croire qu’il y a parmi nous des gens sérieux, honnêtes aussi, capables de la même performance depuis leur table de petit déjeuner que depuis la ligne de mire de leur DG. J’en suis incapable et je ne crois pas qu’à l’échelle sociale ce soit une vérité.
Je pense que le home-office est une connerie, portée par des gens paresseux, et je pense que les créateurs de valeurs et les porteurs de succès, que les femmes et les hommes forts de demain n’ouvriront pas ces portes. Je pense que renvoyer les patrons parmi leurs employés est une connerie, car ce sont des femmes et des hommes de grande expérience, des gens hors normes dont les réflexes et les décisions tiennent les boîtes, et ces personnes ont un besoin crucial de confidentialité, d’isolement et de respect. Je pense que les bureaux partagés et les flex offices ont un vrai intérêt d’optimisation d’espace et de réduction des coûts, que ce sont des solutions brillantes et efficaces, qui ont en plus pour effet secondaire de dynamiser les activités. Je pense que les bureaux connectés seront une innovation redoutable lorsque l’on m’expliquera ce que cela veut dire.
L’innovation immobilière est superbe quand elle naît de l’effort de progrès, de la conviction inexpugnable que c’est l’employé qui drive la barque, que notre société est une société de partage haute-fréquence et que les technologies auxquelles on touche aujourd’hui refondent les créations de demain. J’y crois et je pleure de joie. Elle est abjecte, ridicule et embarrassante lorsqu’elle se veut « trendy », lorsqu’on étale des noms fashions comme on étale des caméras cachées sur nos télévisions ou des noms grecs à nos générations. Je suis de la génération A, comme A-class, comme Avançons, comme Aspergeons-nous de désirs d’efficacité. Que l’employé soit heureux d’en chier.
Léon